Les dispositions du code de la consommation relatives à la publicité trompeuse peuvent-elles-être invoquées par un concurrent?
Une pratique commerciale est considérée comme trompeuse notamment lorsqu’elle repose sur des allégations, indications ou présentations fausses ou de nature à induire en erreur le consommateur normalement informé et raisonnablement attentif et avisé.
Il existe plusieurs types de pratiques commerciales trompeuses : pratiques « par action » (L. 121-2 du code de la consommation), « par omission » (L.121-3), ou pratiques « réputées trompeuses en toutes circonstances » (L. 121-4).
L’article L. 121-5 du même code précise que les dispositions de l’article L. 121-2 et L. 121-4 sont applicables entre professionnels ; les dispositions relatives aux pratiques commerciales trompeuses par omission sont donc exclues dans cette hypothèse.
Deux éléments doivent être appréciés afin qu’une pratique commerciale soit considérée comme trompeuse : le comportement du professionnel et son effet sur le consommateur.
Si le consommateur est incité à prendre une décision d’achat qu’il n’aurait pas prise en d’autres circonstances, son comportement en est donc altéré. Il convient de noter que les textes de transposition de la directive 2005/29/CE dite « pratiques commerciales déloyales » ne mentionnent pas ce critère d’altération du comportement du consommateur, et ce bien que la directive le mentionne expressément.
A cet égard, dans une affaire opposant deux concurrents, la Cour de cassation a récemment rappelé que la condition d’altération du comportement du consommateur doit impérativement faire l’objet d’un contrôle des juges du fond (Cass.Com., 1er mars 2017, n°15-15.448, P+B+I).
Un fabricant de cosmétiques avait nommé l’un de ses produits « savon tradition Alep », alors que ce dernier était fabriqué en Tunisie ; cette précision était également indiquée sur l’emballage, mais dans des caractères nettement moins visibles. La cour d’appel de Lyon a considéré que le nom du produit était de nature à induire les clients en erreur sur l’origine du produit en leur faisant croire que le savon provenait d’Alep, et que cette confusion était en l’occurrence constitutive de concurrence déloyale vis-à-vis d’une société qui commercialise des savons d’Alep réellement fabriqués en Syrie.
En censurant l’arrêt d’appel, la Cour de cassation confirme que la démonstration de l’altération substantielle (effective ou potentielle) du comportement économique du consommateur est l’un des éléments constitutifs nécessaire à la qualification de pratique commerciale trompeuse.
Une pratique commerciale trompeuse peut être constitutive de concurrence déloyale, alors même que la société invoquant les dispositions du code de la consommation n’est pas visée par la communication de son concurrent (ce qui est fréquemment le cas en matière de publicité comparative). Pour autant, l’ensemble des éléments constitutifs de cette pratique doivent être réunis afin de pouvoir être invoqués par un concurrent.
Rappelons que les pratiques commerciales trompeuses sont sanctionnées pénalement et civilement, et qu’elles visent les pratiques mises en œuvre ou qui produisent leurs effets sur le territoire, ce qui permet d’encadrer également les pratiques engagées depuis l’étranger.
NB : depuis 2008, le code de la consommation ne réprime plus uniquement la publicité trompeuse, mais incrimine plus largement les pratiques commerciales trompeuses ; qui font elles-mêmes partie de l’ensemble plus général des pratiques commerciales déloyales.